Le numérique socialiste se cherche

Le 15 mai 2012

Le premier gouvernement de François Hollande devra se saisir des questions numériques. Mais qui n'ont pas toujours semblé passionner le candidat ... Les décisions - ou l'absence de décisions - dépendront largement des compétences retenues pour gérer ces enjeux, et de la place accordée au numérique dans le nouveau gouvernement. Et là encore, rien n'est fait.

Le changement c’est maintenant ! Juré, c’est la dernière fois qu’on se moque un peu du slogan de campagne du nouveau Président. Mais à propos d’Internet, c’est trop tentant : les thématiques numériques ont déserté débats, échanges et empoignades du dernier marathon électoral. Certes un sursaut a eu lieu dans les toutes dernières semaines, l’occasion pour nous de dresser un comparatif des e-programmes des différentes personnalités du PS, mais l’essor s’est arrêté là.

[visu] En 2012, Internet n’existe pas

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Visualiser en un coup d’œil les propositions des candidats sur le numérique. C'est ce que OWNI vous propose en ...

Pour le président entrant, le défi s’impose d’une meilleure intégration des questions numériques dans l’agenda du gouvernement. Mais avant de plonger les mains dans le cambouis, reste à savoir à qui on va confier les clés à molette du Net. Et là, ça se corse.

Incarnation

La question qui agite les observateurs du réseau porte sur celles et ceux qui incarneront le quinquennat numérique qui vient. Pendant la campagne, l’activité de Fleur Pellerin a marqué les esprits des caciques du secteur numérique. De conférences en tours de table, la conseillère référendaire à la Cour des Comptes a réussi en quelques mois à s’approprier un sujet, et un secteur. Secteur qui déjà la voit en Éric Besson au féminin, chargée de l’économie du numérique sous l’autorité d’un ministère de plein droit.

La principale intéressée, comme l’ensemble de l’équipe de campagne, est entrée depuis quelques jours dans un mutisme presque total. Mais n’avait pu s’empêcher au lendemain de la victoire de déclarer :

Je pense que naturellement, toutes les personnes qui ont fait partie de l’équipe de campagne sont des postulants naturels, [...] soit de l’équipe gouvernementale soit des conseillers proches. [...] Je ne ferme aucune porte.

L’Internet socialiste

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Nommée récemment responsable du pôle numérique de François Hollande, Fleur Pellerin connaît une arrivée agitée dans ...

Quelque soit son poste (ministre, ministre déléguée, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, conseillère technique à l’Élysée), il est fort probable que l’on recroisera Fleur Pellerin au cours du quinquennat qui s’ouvre. Sans doute pour s’occuper de ce fameux “écosystème numérique”, qui va des start-ups à la régulation de l’économie du secteur.

Côté culture, c’est le flou. A l’instar des valse-hésitations du nouveau président autour d’Hadopi, les hypothèses se sont multipliées à la vitesse d’un téléchargement de film en P2P. L’ancien président d’Arte Jérôme Clément a un temps été pressenti pour occuper le maroquin culturel. Actif conseiller de l’ombre de l’équipe de campagne, il est allé jusqu’à rédiger en grande partie la tribune du candidat Hollande sur ces questions.

A l’heure actuelle, deux scénarios animent les dîners en ville et les réseaux : soit Aurélie Filippetti obtient un ministère de la culture atrophié (la communication disparaîtrait et la rue de Valois serait le ministère du spectacle vivant et du patrimoine), soit Martine Aubry hérite d’un grand ministère inédit regroupant culture, numérique et éducation ou jeunesse.

Des rumeurs qui traduisent la difficulté constante des gouvernements à se saisir des problématiques ayant trait au réseau.

Gouvernance

Au-delà des questions de personnes, la façon dont le numérique sera traité au niveau institutionnel doit également préoccuper le nouveau président de la République et ses équipes. L’enjeu est de taille : intégrer à un gouvernement une technologie transversale et des usages qui touchent autant les pratiques culturelles que la santé, la liberté d’expression ou la protection des consommateurs, tout en constituant un secteur économique en pleine expansion. Une gageure, donc.Qui a fait l’objet de multiples ajustements institutionnels au fil des années.

Hollande entreprend la culture

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Le flou de l'après Hadopi, c'est du passé. Dans une tribune qui paraît dans Le Monde, le candidat socialiste ...

Un article d’Electron Libre en fait la liste : neuf ans de coordination interministérielle, puis cinq ans de pilotage gouvernemental identifié (un secrétariat d’État auprès du Premier ministre d’abord puis un ministère auprès du ministre de l’économie et des finances). Avant de défendre une idée poussée notamment par Fleur Pellerin : la création d’un “e-Premier ministre”, conseiller spécial du président en matière numérique.

Cette option dénoterait une importante volonté politique de mettre le numérique au cœur du projet du nouveau président, en évitant les querelles de clochers entre administrations. Pourtant, pas sûr qu’en dehors des spécialistes du secteur l’enjeu soit perçu comme essentiel.

D’autant qu’avant de s’attacher à intégrer le numérique dans un dispositif gouvernemental, il s’agira sans doute de rationaliser l’action des autorités publiques ayant en charge des bouts de réseau. Cnil, Arcep, Hadopi, Arjel, CSA : la liste est longue et le serpent de mer de la fusion de certaines de ces autorités refait plus que jamais surface.

Une seule certitude : autorités, conseillers ou membres du gouvernement essaieront, une fois en place, de défendre leur pré carré.


Illustration par Share (CC-sa) remixée par Ophelia Noor pour Owni /-)

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